C'était un retour aux sources, à la recherche de mon passé, du passé de ma famille, de mes parents, mais je n'osais approcher mon clan natal de peur des réprimandes de mon ancêtre qui devait désormais avoir eu vent de mon lourd secret. J'errais donc comme une âme en peine parmi les bois entourant les lieux sacrés de ma douce enfance, bois de feuillus ancestraux et immenses empreints de nostalgie et de souvenirs de gosse, ayant quitté le terrible et maudit village sans nom de Lumïa qui m'avait conduit dans un périple dangereux. J'y avais laissé la jeune Linaewen, ou plutôt nos chemins s'étaient séparés, et j'avais volé sans relâche, pourfendant les cieux a basse altitude, et les lacs, plaines et forêts filaient a toute vitesse tels des spectres trop rapides pour les yeux. Il faisait un bout de temps que je n'avais plus voyagé ainsi, ayant préféré la course féline pour les courts trajets lors des derniers mois, et cette sensation d'évasion m'avait manqué; j'aimais sentir mes cheveux flotter dans le vent, et l'absence de vol avait terriblement affecté Pyrrhus, ma monture et compagnon, l'oiseau cramoisi. Désormais, je déambulais parmi les troncs centenaires de ma vie passée, sans but précis hormis le même que à mon habitude: vivre simplement et en être heureux.

Le soleil brillait du haut de son royaume céleste et inaccessible, tel un souverain veillant sur ses sujets, des petits nuages blancs et vaporeux qui flottaient doucement dans cet océan azur, tels des icebergs. Les rayons du soleil dardaient ma peau de porcelaine alors que je parcourais la forêt, m'entraînant à la course parmi les racines qui jonchaient le sol , mes pattes faisant trembler la terre et chanter les feuilles autour de moi. Soudain, un bruissement furtif. Une ombre ardente, ressemblant fort a Pyrrhus, avec un éclat qui était cependant beaucoup plus marqué; mais les bêtes étaient, en taille, identiques. Les arbres s'illuminent encore un instant, puis c'est de nouveau le vide, et tout redevient comme cela était il y a quelques minutes. Je m'approchai de ce qui avait semblé être un rêve, et j'y distinguai une forme humanoïde incertaine qui s’avançait d'un pas incertain parmi les feuillus. L'ombre grimpa à l'arbre.

Toujours sous forme féline, j'en fis autant, sur un arbre adjacent mais touffu, et m'y perchai à la même hauteur que ce qui s'avérait être une jeune fille. Ses cheveux mi-longs et d'un joli rose tombaient par mèches fines et mignonnes sur ses épaules menues, et ses pommettes montraient un visage souriant. Elle restait là, sans bouger, et des minutes passèrent... Cinq, puis dix, puis quinze mais rien n'égalait la patience d'un félin, malgré l’absence d’événements . Un instant, j'avais entendu sa voix, se plaignant de la densité de la forêt. J'étais alors intervenu, discrètement, en m'approchant un peu plus de la jeune fille et un peu plus loin sur ma branche. J'allais l'effrayer, mais je ne pouvais jouer le funambule sous forme Elfique sur les fragments de bois comme celui-ci. Je devais au moins la rejoindre, pour l'aider, et pour la rassurer. En me voyant, ses yeux s'ouvrirent en grand.

La jeune inconnue me voit, et ses yeux bleus tel une mer exotique s'ouvrent en grand. Sa réaction est bien plus terrible que ce que j'ai escompté, et sous la surprise, elle tombe à la renverse, atterrissant sur son postérieur. Sa chute d'un couple de mètres à peu près l'a un peu assommée et la pauvre époussette ses mains, légèrement sonnée, puis lève les yeux vers ma position. Je suis toujours debout sur la branche, et je l'observe de mes yeux verts et luisants. Elle se relève, ses pupilles azur fixés sur mon corps félin, et me lance d'une jolie voix: - Oula... Euh... Pas bouger, touuuut doux, gentil gentil! Elle fait un geste de décompression en abaissant sa main vers le sol. - Tu as du te perdre toi aussi, mais euh, je suis moi aussi perdue, donc je … vais... tout simplement... repartiiiir! Que du contraire, je ne suis on ne peut plus à l'aise dans la forêt. Elle fait volte-face et entame une course effrénée, et malgré qu'elle est effrayée et qu'elle ne m'a rien fait, j'ai envie de la courser. Enfin, c'est surtout pour l'aider, elle a vraiment l'air perdue!

D'un bond souple et animal, je rejoins la terre ferme et m'élance vers la fuyarde. Mes pattes heurtent le sol avec force et vigueur et le vois sa chevelure rosée voler derrière ses pas affolés. Je la rattrape facilement et elle est désormais très près de moi; je peux presque sentir son léger parfum printanier. Soudain, un énorme oiseau, ses plumes tout de cramoisi colorées, surgit devant notre poursuite, en face de nous. Ses ailes sont hachées par le contraste du soleil et du ciel bleu et sans nuage derrière lui, et une légère brise souffre, ébouriffe son corps. Il crie soudain, et la jeune femme en fait autant. Celle-ci a subitement changé de direction, et quelques secondes plus tard, nous avons changé de sens, le volatile a nos trousses. Je ne peux piper mot sous ma forme bestiale, et je ne peux redevenir Elfe pour m'exprimer, je la perdrais. Je continue donc a frapper le sol de mes membres poilus de léopard. Je ne vais pas tarder à la stopper, et elle le sent, la peur vibre dans sa respiration. Son équipement n'est pas adapté à la course forestière...

Spoiler:

Malgré l'envahissant volatile qui nous surprend tout les deux, elle continue sa course, plus hésitante, et semble vouloir se diriger. Avec une certaine grâce, elle attrape un petit bouleau à sa porté pour bifurquer grâce a lui, exécutant un quart de tour; elle n'a rien perdu de sa vitesse. Elle a emprunté le sentier qui s'était dessiné il y a quelques secondes a peine - ou plutôt je l'avais aperçu a ce moment - et ses pieds foulaient toujours le sol avec un instinct que j'apparenterai à de la survie. La voie était sans issue, cependant elle n'en avait cure, ou plus simplement elle n'avait pas vu le danger qui la guettait. Je n'avais plus esquissé le moindre pas, la jeune fille allant s'arrêter au bord du gouffre; je n'aurais plus qu'à revêtir ma forme Elfique et m'avancer pour lui parler.

Quelque chose cloche, la jeune femme s'est retournée vers moi - Pyrrhus s'étant envolé - un fin sourire étirant ses lèvres d'un rose pâle, et elle avance toujours à reculons d'un pas constant; je suis en proie au doute. Elle n'est plus qu'à quelques mètres du vide. Mon sang ne fait qu'un tour, et je tente d’appeler l'oiseau, mais seul un rugissement sort de ma gorge; cela lui suffit, et je m'élance donc vers la jeune fille qui chancelle. Son corps bascule en arrière tandis que je saute au dessus de celui-ci, d'un bond félin, avant de me métamorphoser en plein vol. Comme si ce mouvement avait été répété maintes fois, j’atterris sur l'oiseau qui s'est glissé sous mes pieds. La communication mentale entre lui et moi s'accroissant de jour en jour, je lui fais comprendre mes intentions et il en fait de même pour l'inconnue que pour moi même.

Le piqué de mon compagnon m'ébouriffe les cheveux tandis que je l'aperçois fermant les yeux, sa chevelure volant autour d'elle; elle n'a rien vu des événements alentours, et le fond du gouffre se rapproche dangereusement, mais Pyrrhus est plus rapide. Je tends les bras pour la réceptionner et lui offre mon plus beau sourire alors que ses paupières dévoilent doucement ses pupilles bleutées. Le volatile a repris une course plus sécurisante, et je la tiens dans mes bras, la regardant dans les yeux.

Juste a temps, elle tombe dans mes bras et me regarde de ses yeux bleus et jolis, comme transperçant mon être, et elle est toujours dans mes bras, alors je la pose derrière mon dos, a l'arrière de Pyrrhus qui peine légèrement pour soutenir les deux personnes, malgré le poids fluet de la jeune fille. Ses yeux s'écarquillent sous l'incompréhension et elle pointe du doigt Pyrrhus puis moi même, alternativement. - Vous.... c'est votre... J'opine du chef alors que ses lèvres tremblent, elle se retient d'éclater de rire, mais n'y parvient, et on entend le son cristallin de sa voix dans toute la vallée. - Mais …. ahhhha ahh, si vous saviez la peur que vous m'avez fait ! J'ai cru que mon cœur allait exploser! En quelques secondes, elle retrouve son sérieux et me demande, la tête incliné sur le côté: - … Vous êtes qui en fait ?

- Je suis Léo Manjano, changeling Elfe et panthère, et je voyage un peu partout. Tu avais l'air perdue, alors je t'ai suivie, mais on dirait que tu as pris peur... Mais tout va bien désormais! Je lui réponds en souriant, et dirige le pauvre oiseau vers le sol, nous remontons de manière presque parallèlement à la paroi, et je me cramponne a ses plumes. Alors que nous atteignons le sol, j'aide la jeune fille a descendre, et je luis demande:

- Ah, au fait, comment t’appelles-tu? Et, si ce n'est pas indiscret, que fais tu ici?

Je prends un instant pour apprécier la magnifique journée qui s'offre a nous. L'astre solaire brille de mille feux tel un joyau du haut de son ciel, et quelques nuages blancs flottent doucement parmi cet océan azur; j'observe la scène printanière qui s'offre à moi le menton levé, humant l'air ambiant. J'aime vraiment cette forêt.

Elle s'est agrippée a mon vêtement tandis que l'on frôle les parois de la crevasse, l'oiseau rouge à la limite de la verticale, et ma tête est levée vers les cieux. Le soleil y règne tel un bienveillant souverain régnant sur ses sujets, de petits nuages blancs et vaporeux. Soudain, nous surgissons à l'air libre, ou plutôt nous sortons du gouffre béant, et Pyrrhus se pose bien vite sur le sol couvert d'herbe verte et ondulante. La jeune fille saute avec assurance sur le sol. - Moi c'est Meian ! Juste Meian ça suffit. Et j'étais en train de fuir Alcombord parce que... Elle écarquille les yeux, elle a l'air d'être sur le point de révéler un lourd secret par pure mégarde, mais elle se reprend. - Parce que... parce que... Parce que voila... Je lui lance un sourire compréhensif, sans me poser plus que questions. A vrai dire, je me fiche de ses méfaits.

Sa main droite est derrière sa tête, et elle arbore une mine joyeuse et embarrassée. - Et donc voila comment je me suis retrouvée ici... complètement perdue... Et j'ai épuisé mon stock de vivres, donc je cherchais un pied à terre, un petit village... quelque chose quoi ! Mais rien, cette forêt est plus vaste que je me l'imaginais. Cela tombe bien, c'est ma forêt. Elle n'a pas l'air dans son assiette soudain, et baisse la tête vers le sol avant de s'y asseoir.

- Bon, comme tu as faim, je vais te faire a manger! Reste là, je reviens tout de suite. Je n'ai pas besoin de son avis, son estomac me l'a donné, alors je me métamorphose. Bien vite, je repère une petite biche égarée et inconsciente, sous les arbres près d'une mare, et elle s'abreuve. Je ne prends même pas la peine d'être discret, je suis assez rapide pour me le permettre, alors je fonce, et mes pattes félines martèlent le sol, faisant trembler la terre entière. Lorsque le cervidé se retourne, il est trop tard pour lui, car j'ai déjà bondi et atteint son cou. D'une torsion de la mâchoire, j'abrège ses souffrances et la traîne jusqu'ici, la scène n'ayant duré que quelques secondes. Je sors un de mes katanas - Oui, je n'ai que ca pour dépecer ma viande, et alors? - et entreprend d'en tirer les meilleures parties que je pique sur une broche, puis, avec mes quelques allumettes, j'allume un petit feu au milieu de la clairière.

Spoiler:

J'ai vite fait d'attraper et de tuer la pauvre biche inconsciente qui s'abreuve d'une torsion de la mâchoire, et je tire la carcasse vers notre petit camp et lance une rapide cuisson au dessus d'un feu. La viande est bientôt cuite et son odeur grillée ainsi que sa couleur me donne déjà faim. J'ai placé la viande sur un grand plat et, après l'avoir dépecé, nous avons mangé sans aucune retenue, Meian avalant une quantité de mets digne de mon propre appétit, et dévore une bonne partie des aliments; cela ne me dérange pas, je n'ai pas très faim. Pendant qu'elle mange, tu prends un instant pour apprécier les environs, cette forêt empreinte de nostalgie. Parmi les troncs épais, je distingue des lapins, quelques biches prudentes au loin, et le doux chant d'un ruisseau alentour parvient à mes oreilles comme une chanson. Le soleil brille du haut de son royaume céleste, et quelques nuages blancs et légers filent a travers l'océan azur. Je m'adonne à un arbre, les mains derrière la tête, et souri devant l'air repu de la jeune fille.

- En tout cas c'était vraiment délicieux... On peut dire que vous m'avez sauvée deux fois. J'ai une dette envers vous, si jamais vous avez besoin de quoi que ce soit, j'aimerais vous aider !

Elle semblait vouloir m'être redevable.

- Ce n'est rien! C'était un acte d'instinct et je n'ai pas vraiment réfléchi, c'était naturel.

Un sourire se dessine sur mes lèvres, et Meian en fait autant. Elle a l'air de vraiment vouloir de me remercier, mais je n'ai aucune idée de la manière dont elle mourrait s'y prendre. Je pousse un soupir de bien-être et m'étend un peu plus sur le tronc. Ce bois est immense, et n'ayant pas visité cette part de la forêt en elle même, pourtant j'ai l'impression de la connaître, elle possède la même ambiance empreinte de magie; lorsque j'étais petit, j'adorais aller sous des sapins qui ne laissaient plus filtrer la lumière du jour, et m'y rouler en boule pour somnoler. Bien vite, je revins à la réalité à l'entente de la voix de Meian.

Spoiler:

Alors que ton ventre repu te criais au repos, tu te contentais de scruter trait par trait ton sauveur. Tu aurais pu deviner plus tôt qu'il s'agissait d'un elfe : Son visage angélique encerclé par une tignasse blonde plus soyeuse que la tienne, sans compter ses oreilles qui dépassaient en pointe de chaque côté. Il ne semblait pas être préoccupé, ni dans le besoin, car il refusa ta proposition, clamant la naturalité de la chose. Ce n'était pas faux, l'aide de nos jours étaient si rare qu'on pouvait en oublier qu'il ne s'agissait pas d'une monnaie d'échange, mais bien d'un acte honnête, d'un don. Ta gratitude sera donc tout ce qu'il recevra de toi... A vrai dire, tu n'avais rien d'autre à ce jour.

Un léger blanc s'installa entre vous deux.. tu ne savais plus trop quoi faire ni quoi dire... Jusqu'à ce que ton objectif premier te revienne en mémoire.

- Dîtes... Vous semblez être à l'aise avec cet endroit. En ce qui me concerne je suis complètement perdue alors... Peut-être que par le plus grand des hasards vous sauriez s'il y a un village ou un quelconque endroit ou je pourrais trouver refuge pendant quelques temps ?

Ta fuite d'Alcombord t'avais laissée sans un sous, mais surtout sans chaumière ni travail pour subvenir à tes besoins... humainement parlant. Tu avais fais ce choix, celui d'en pâtir autant qu'il le faudrait afin de vivre comme si tu n'étais rien de plus qu'un mortel vieillissant.. alors qu'il te restait encore des décénies devant toi. Ton regard était toujours aussi pétillant, impatient d'avoir une réponse favvorable, impatient de te découvrir une nouvelle vie, une nouvelle famille, un nouveau logement, travail et amis. Et oui.. les phoenix n'ont pas peur du renouveau.

Spoiler:

Après ce fin repas, je m'adossai à un arbre pour profiter du bon temps et admirer ce splendide environnement empreint de magie et de nostalgie; du haut du ciel azuré, le soleil brillait avec force, nous dardant de ses doux rayons bienveillants tandis qu'une fraîche brise me caressait le visage. Repue, Meian s'était assise en tailleur devant moi et avait entrepris de me détailler, et j'en fis de même, discrètement. Ses fins cheveux rosés retombaient doucement par mèches sur ses frêles épaules, et elle souriait. Elle s'adressa à moi d'une voix plutôt fluette.

- Dîtes... Vous semblez être à l'aise avec cet endroit. En ce qui me concerne je suis complètement perdue alors... Peut-être que par le plus grand des hasards vous sauriez s'il y a un village ou un quelconque endroit ou je pourrais trouver refuge pendant quelques temps ?

J'esquissai un sourire.

- Si vous parlez des alentours immédiats, je ne connais pas cette partie de la forêt par cœur, malgré qu'elle me soit familière par mon enfance; je suis simplement à l'aise en milieu forestier. Mais si vous le voulez, nous pouvons survoler la forêt afin d'y trouver la civilisation!

Phyrrhus, qui avait perçu mon envie de m'envoler, tourna la tête et poussa un cri enthousiaste, s'approchant de nous à petit pas. J'aidai Meian a grimper sur le dos du volatile vermillon qui n'aurait aucune difficulté à nous soulever tout deux, au vu du poids léger de la jeune fille; je ne tardai pas à la rejoindre, devant elle, et en quelques battements d'ailes nous décollâmes pour rapidement dépasser la cime des arbres ancestraux. Vu d'ici, la forêt Lysa semblait tel un océan vert qui ne connaissait pas de sol, et l'astre solaire qui illuminait ce lieu splendide augmentait encore d'avantage la beauté du lieu. Partout autour de nous s'étendait, à l'horizon et à trois-cent-soixante degrés, une mer sylvestre. Le vent frais faisait voler mes cheveux derrière moi.